Monsieur le ministre, pouvons-nous, de notre côté, compter sur vous et sur votre administration ? La réponse est loin de s’imposer !

27 Mai 2025 | Vie des agents

Le CSAM (comité social d’administration ministériel) de printemps s’est ouvert ce mardi 27 mai ; afin de vous faire suivre son action, la Liste d’Union CGT-FSU-Solidaires vous propose de prendre connaissance ci-après de son adresse au ministre :

Monsieur le Ministre, Monsieur le Président, chers collègues,

Nul besoin de vous dire à quel point l’actualité internationale est anxiogène. La situation à Gaza a exigé la déclaration liminaire que nous venons de vous adresser, mais de toute évidence ce n’est que le sommet émergé d’un iceberg de bouleversements que nous devons affronter ensemble. Vous pouvez, vous le savez, compter de votre côté sur l’engagement de vos équipes, de tous ces collègues en France et partout dans le monde qui, quel que soit leur profil ou leur statut, font preuve d’une abnégation exemplaire pour les affronter.

Pouvons-nous, de notre côté, compter sur vous et sur votre administration ? La réponse est loin de s’imposer !

Certes, tout le monde semble avoir fait bloc au moment du fâcheux épisode de l’amendement fiscalisant les IRE adopté par le Sénat sans débat préalable avec les agents. Mais nous considérons que son retrait est davantage le résultat de la mobilisation des élus qui se sont faits le relais de nos préoccupations que celui d’une volte-face d’un gouvernement initialement prompt à s’abstenir lors du passage du texte.

Pour le reste, les voyants nous semblent tous au rouge.

1. Le contexte budgétaire, d’abord, qui a enterré les espoirs portés par les États généraux de la Diplomatie. Ces derniers avaient conduit le Chef de l’Etat à se départir de l’habituel mépris avec lequel il nous considère. 700 emplois devaient être créés. Une goutte d’eau par rapport à nos besoins, mais peut-être celle qui devait empêcher le vase de déborder. Las ! 2 ans plus tard, le ministère a été rattrapé par la situation de nos finances, les emplois promis se sont envolés et les agents sont laissés à leurs rythmes de travail toujours plus effrénés.

Un chiffre parlant, par exemple : Pour 2024, 134 années de congés non pris, juste pour l’étranger… un chiffre qui a doublé depuis l’année dernière ! L’administration doit faire plus pour inciter les agents à profiter de ce droit élémentaire, pourtant durement acquis : celui de prendre des congés. La Liste d’Union demande un chiffrage précis de cette masse salariale économisée sur le dos des agents et une réflexion sur la manière dont ces économies pourraient profiter aux travailleurs : transfert automatique des congés non pris sur les CET des agents ou dans le stock de dons de jours de congés aux collègues qui le nécessitent, alimentation du budget de la DSE ou de celui de l’ADOS.

Pour faire face à ces contraintes budgétaires et à leurs conséquences impromptues sur les promesses qui nous ont été faites, nous exigeons dorénavant l’adoption d’une loi de programmation budgétaire pluriannuelle à l’instar des autres ministères de la Fonction publique. Le budget du MAE, et notamment de ses effectifs, est trop souvent la variable d’ajustement du budget de l’Etat, soumis à des coupes de dernière minute sans que nous puissions avoir une visibilité sur la question.

2. En termes de dialogue social ensuite, le tableau est tout simplement consternant. Malgré toute la bonne volonté et l’abnégation des personnels du bureau STRATRH/DIAGSOC, avec lesquels nous travaillons étroitement et à qui nous souhaiterions ici rendre hommage, le compte n’y est pas.

En Centrale, multiplication des groupes de travail sans queue ni tête, absence de communication des dossiers de séance en amont et des comptes-rendus en aval, réduction à peau de chagrin de l’ordre du jour de la présente instance.

À l’étranger, les recrutés locaux ne peuvent toujours pas être représentés par des spécialistes du droit local en CSAPE, les CCL sont systématiquement placées devant le fait accompli de décisions de licenciement non négociées, les DUERP sont laissés en jachère, quand ils existent. À propos des DUERP, certes, la simplification du document et les efforts que nous saluons de l’ISST et de la conseillère de prévention ont permis de faire avancer les choses mais nous arrivons au terme de notre mandat professionnel et la plupart de nos élus en poste n’ont toujours pas reçu la moindre formation RSST. Nous dénonçons enfin les difficultés à faire respecter les droits syndicaux dans les EAF (problèmes de décharges syndicales, de convocations aux instances et de formations pour les élus).

Dans de trop nombreux postes, nous ne voyons pas, sur ces questions de dialogue social, de réelle implication des chefs de poste. Nous souhaitons donc que, dans les postes de plus de trente agents, les organisations syndicales, au travers par exemple de leurs élus en CSAM, soient interrogés dans le cadre de l’E360 des chefs de poste, de manière à ce qu’elles puissent délivrer une analyse approfondie des aptitudes de ces derniers en matière de dialogue social. Dans la même veine, nous souhaitons que les synthèses des rapports d’Inspection soient systématiquement communiquées aux représentants des personnels, comme elles le sont aux chefs de postes, afin qu’ils aussi puissent émettre un avis sur les propositions qu’elles contiennent.

Enfin, en matière de dialogue social toujours, nous vous rappelons l’arrivée à grands pas des prochaines élections professionnelles, et demandons à recevoir au plus vite un rétroplanning des opérations, ainsi qu’une renégociation de l’accord-cadre sur les compétences des CCL.

3. Mais le problème fondamental, dans ce ministère, il est humain plus que budgétaire. Nous perdons de vue de plus en plus fréquemment les valeurs humaines qui réunissaient auparavant les agents et les conduisaient à se dépasser pour défendre les intérêts de la France, son image dans le monde et ses communautés éparpillées à l’étranger.

Arrêtons-nous une minute, par exemple, sur le cas des collègues travaillant dans les services traitant des affaires sociales. Partout sur la planète, ils font face à des ressortissants français dans des situations de détresse croissante. Et comment le Ministère souhaite-il répondre à cette précarisation ? Par de nouveaux logiciels. Sans même parler de l’illustration par l’absurde que représente Scolaide, qui devait nous libérer et qui aura finalement produit plus de burn-out que tout autre logiciel avant lui et sur lequel nous reviendrons abondamment en séance.

C’est la logique même qui préside à ce choix qui nous hérisse : les sujets que nous traitons sont profondément humains et ce ne sont ni de nouvelles applications, ni le recours croissant à l’intelligence artificielle qui nous permettront d’y faire face, mais des moyens en personnels, du temps de cerveau disponible pour une attention empathique et bienveillante à l’égard de nos compatriotes en difficulté.

Enfin, nous souhaiterions attirer votre attention sur deux points d’une importance fondamentale :

– La question des postes en crise. Nous avons une pensée pour les collègues morts à Gaza et vous demandons des engagements fermes sur les conditions de protection de nos collègues en Iran, en Libye, en Syrie et au Liban et exigeons pour la millième fois que des instructions claires soient données aux consulats pour l’inscription dans les plans de sécurité et donc dans le Registre, en protection, des recrutés locaux et de leurs familles, conformément aux engagements du ministre lors du dernier CSAM,

– Second point, nous déplorons l’absence dans l’ordre du jour de cette instance de toute question relative à nos opérateurs. Dans un contexte où ils subissent de plein fouet les coupes budgétaires les plus sévères, nous vous demandons d’adopter un cap clair pour les défendre.

Nous vous remercions pour votre attention.